2011/09 > Le point sur le décret d’application relatif aux noms de domaine
L’entrée en vigueur du nouveau régime juridique français des noms de domaine instauré par la loi du 22 mars 2011 était partiellement suspendue à l’adoption de son décret d’application (notre flash avril 2011). Ce dernier attendu au 1er juillet a, en réalité, été publié seulement le 3 août 2011. Par Communiqué du même jour, l’AFNIC, actuel Office d’enregistrement des .fr et .re, a précisé qu’elle procèderait à l’examen des 6158 demandes accumulées depuis le 1er juillet 2011 de sorte d’y répondre dès le 29 août.
Les dispositions législatives soumises à la parution de ce décret concernent la procédure de désignation de l’Office d’enregistrement, les modalités d’accréditation des bureaux d’enregistrements intermédiaires entre le demandeur et l’Office, mais également et surtout sur la définition des notions « d’absence d’intérêt légitime » et d’ « usage de mauvaise foi » sur le fondement desquels l’Office est en droit de refuser l’enregistrement ou le renouvellement d’un nom de domaine, soit parce qu’il porte atteinte à des droits de propriété intellectuelle ou de la personnalité, soit parce qu’il est identique ou apparenté à celui de la République Française, d’une collectivité territoriale, une institution ou service public national ou local (2°et 3° de l’art. L 45-2).
Ces deux notions sont maintenant définies à l’article R.20-44-43 du décret. En réalité, les rédacteurs ont choisi de se référer à l’ « existence d’un intérêt légitime » plutôt qu’à son absence et ce par une liste non exhaustive de différents exemples. Ainsi l’intérêt légitime est « notamment (…) le fait pour le demandeur ou le titulaire d’un nom de domaine (i) d’utiliser ce nom de domaine ou un nom identique ou apparenté, dans le cadre d’une offre de biens ou de services, ou de pouvoir démontrer qu’il s’y est préparé, (ii) d’être connu sous un nom identique ou apparenté à ce nom de domaine, même en l’absence de droits reconnus sur ce nom, (iii) de faire un usage non commercial du nom de domaine ou d’un nom apparenté sans l’intention de tromper le consommateur ou de nuire à la réputation d’un nom sur lequel est reconnu ou établi un droit.
Quant à la notion de mauvaise foi, elle recouvre notamment (…) le fait (i) d’avoir obtenu ou demandé l’enregistrement de ce nom principalement en vue de le vendre, de le louer ou de le transférer de quelque manière que ce soit à un organisme public, à une collectivité locale ou au titulaire d’un nom identique ou apparenté sur lequel un droit est reconnu et non pour l’exploiter effectivement, (ii) d’avoir obtenu ou demandé l’enregistrement d’un nom de domaine principalement dans le but de nuire à la réputation du titulaire d’un intérêt légitime ou d’un droit reconnu sur ce nom ou sur un nom apparenté, ou à celle d’un produit ou service assimilé à ce nom dans l’esprit du consommateur, (iii) d’avoir obtenu ou demandé l’enregistrement d’un nom de domaine principalement dans le but de profiter de la renommée du titulaire d’un intérêt légitime ou d’un droit reconnu sur ce nom ou sur un nom apparenté, ou de celle d’un produit ou service assimilé à ce nom, en créant une confusion dans l’esprit du consommateur.
Il appartiendra pour le reste à l’Office de définir plus précisément l’une et l’autre de ces notions. Tel est ce que la loi avait prévu.
On constate ainsi que tant la loi que le décret ne font aucune référence aux critères d’existence de droits antérieurs ou de risque de confusion ou encore à la similitude des produits ou services en cause, mais il doit être souligné encore une fois que la loi ne donne aucune définition de la nature juridique du nom de domaine et donc des rapports qu’il doit entretenir avec le droit des signes distinctifs. De la même manière, on rappellera que la bonne foi est inopérante en matière de contrefaçon, alors que ce critère parait au final central dans l’attribution des noms de domaine en France.
L’AFNIC reste compétente pour les domaines de premier niveau dont elle a eu jusqu’à présent la gestion, à tout le moins jusqu’à la publication d’un arrêté du Ministre chargé des communications électroniques qui doit intervenir après consultation publique. Il n’est pas exclu que des Offices distincts soient désignés pour les extensions des départements et territoires d’outre-mer français.
Enfin, la procédure extrajudiciaire de règlements des litiges devant le Centre d’Arbitrage et de Médiation de l’OMPI est suspendue depuis le 15 avril 2011 et celle devant l’AFNIC (PREDEC) depuis le 15 mai 2011. Si la désignation d’un ou plusieurs Offices n’est plus qu’une question de quelques semaines, les discussions relatives aux règlements des litiges par voie extrajudiciaire pourraient en revanche prendre encore plusieurs mois.
Il en résulte qu’aujourd’hui, les contentieux relatifs à une demande de suppression ou de transfert de nom de domaine relevant du .fr ou du .re (Art. L.45-6) ne peuvent être réglés que devant le Centre de Médiation et d’Arbitrage de Paris si la partie adverse l’accepte, ou à défaut de règlement amiable, que devant les tribunaux judiciaires.